Me voici de retour pour vous faire découvrir le Japon de chez vous à travers un simple calendrier ! 🙂
Tada ima ! ただ今 !
Tout d’abord, je tiens à remercier toutes celles et ceux qui m’ont assidûment suivie et encouragée dans ce voyage au coeur du calendrier japonais d’aujourd’hui.
Initialement planifié sur 12 semaines, mon défi s’est finalement déployé sur 13 semaines. En effet, la période du Nouvel An est si riche que j’ai préféré y consacrer deux articles : les préparatifs jusqu’au 31 décembre inclus et le Nouvel An à proprement parler. 😉
Désormais, pour clore ce chapitre, je vous propose de prendre un peu de recul et de voir ce que nous enseigne plus généralement le calendrier japonais sur le Japon, sa culture et sa société toute entière. Je vais donc vous faire partager ce qui, selon moi, constitue les traits saillants de ce calendrier.
C’est parti !
Au Japon, un calendrier peut en cacher un autre !
A la lecture de mes 13 précédents articles, il n’aura je pense échapper à personne que les Japonais vivent le plus souvent au rythme de deux calendriers, l’un officiel issu pour l’essentiel de l’après-guerre et progressivement révisé en fonction des évolutions sociétales, l’autre officieux, hérité de traditions ancestrales. Tant et si bien d’ailleurs, que les fêtes dites « traditionnelles » sont parfois sentimentalement plus importantes pour eux que les 16 jours fériés inscrits officiellement au calendrier. Le peuple a ses raisons que les politiques ignorent, et inversement ! 😀
Ainsi donc, pour qui le souhaite, coexistent harmonieusement passé et présent. De ce point de vue, les Japonais semblent avoir plutôt tendance au cumul des genres… Comme dans un mille-feuille, ils intègrent chaque nouvelle couche de tradition en préservant la précédente, laissant chacun libre de s’en emparer ou non.
Une année articulée autour de deux temps forts : o shôgatsu et o bon
Toujours est-il que, quels que soient les choix individuels de chacun, deux incontournables semblent faire l’unanimité auprès des Japonais pendant l’année : les festivités du Nouvel An/o shôgatsu/お正月 et celles de o bon/お盆 en juillet/août selon les régions.
A ces deux occasions, de nombreux Japonais retournent auprès de leurs parents dans leurs provinces d’origine, donnant lieu à un phénomène nommé : satogaeri/里帰り/ « retour au pays » . De même, à ces deux périodes de l’année, il est d’usage :
- de donner des nouvelles de soi à ses proches parents et amis en envoyant des cartes de voeux pour le Nouvel An ( nengajô/年賀状) et la période des fortes chaleurs en été (shochû mimai kâdo/暑中見舞いカード ou zansho mimai kâdo/残暑見舞いカード).
- d’offrir des cadeaux en signe de gratitude à ses proches comme à ses relations professionnelles (o seibo/お歳暮 en décembre et o chûgen/ お中元 en juillet).
A ces deux temps forts de l’année japonaise viennent ensuite s’ajouter, en fonction des croyances, de l’éducation reçue, de la sensibilité et des goûts de chacun, une foule d’autres fêtes et rituels, tantôt inscrits au calendrier officiel, tantôt hérités de traditions anciennes.
Japon : un calendrier et des traditions en prise directe avec la nature et les saisons
Le calendrier japonais, les fêtes et les rites associés reflètent également à bien des égards un souci constant de saisonnalité.
C’est devenu un lieu commun que de dire que les Japonais sont sensibles au passage des saisons. Et pour cause ! Comment pourrait-il en être autrement lorsqu’un être humain fait face à tant de beautés et de caprices de la part de Dame Nature au cours des quatre saisons bien distinctes dont peut encore s’enorgueillir le Pays du Soleil Levant ?…
Ainsi, deux des seize jours fériés que compte le Japon sont dédiés aux équinoxes du printemps et de l’automne, en d’autres termes, ceux des deux saisons les plus resplendissantes et spectaculaires aux yeux du commun des mortels : hanami/花見 et momijigari/紅葉狩り sont alors de rigueur ! 😉
Mais à ces commémorations officielles, viennent encore se greffer d’autres dates importantes qui elles, relèvent de l’ancien calendrier « traditionnel » et marquent le passage des saisons. Il s’agit de :
- koromogae/衣替え/ « changement de garde-robe » des 1er juin et 1er octobre.
- risshû/立秋/ « début d’automne » entre le 8 et le 22 août qui coïncide peu ou prou avec la fête de o bon.
- rittô/立冬/ « début d’hiver » aux alentours du 7 novembre qui annonce les festivités de shichi go san/七五三/7,5,3.
De même, dans les créations plus récentes de jours fériés, on ne manquera pas de noter les appellations choisies par les gouvernants, qui parlent au coeur des Japonais : le jour de la mer/umi no hi/海の日, le jour de la montagne/yama no hi/山の日, le jour de la nature/midori no hi/緑の日.
Pour autant, les Japonais n’en oublient pas les ravages que cette même nature fait régulièrement subir aux leurs. D’où cette pratique inscrite dans les rituels du mois de septembre : la prévention des risques naturels…
… qui se déclinent à l’envi dans l’art et l’artisanat
Quoi qu’il en soit, douce ou hostile, Dame Nature reste une source d’inspiration inépuisable pour tous les créateurs, artistes et artisans au Japon.
Poésie, musique, peinture, arts de la scène, il n’est pas un seul domaine des Arts qui échappe à la règle ! Les 13 articles que j’ai consacrés au douze mois de l’année sont d’ailleurs parsemés d’exemples illustrant ce phénomène.
Qui plus est, cuisine, gastronomie et friandises regorgent de variations et de propositions mettant délicatement à l’honneur les saisons, de par les produits utilisés et/ou les apparences évocatrices adoptées (formes, couleurs). Là encore, je vous renvoie à mes précédents articles pour en découvrir des exemples emblématiques. Dans ce savant concert dédié aux papilles gustatives, le mochi/餅 décliné sous toutes ses formes, en versions salées ou sucrées, y tient sans conteste une place prépondérante.
Avis aux amateurs ! 🙂
Jours fériés et fêtes au Japon : une tentative de catégorisation
Pour finir, en bonne Occidentale cartésienne que je suis, je ne peux résister à une tentative de catégorisation concernant les dates phares du calendrier japonais…
Pour ce faire, je vais opérer des regroupements en m’appuyant, tantôt sur l’origine, tantôt sur la nature de chacune de ces dates et fêtes calendaires.
Je ne vous promets de parvenir complètement à mes fins, mais, concernant le calendrier japonais, il s’agit là d’un angle d’attaque que je trouve assez inédit, potentiellement révélateur et intéressant. 😉 Je compte donc sur vous pour m’en donner des nouvelles ! 😀
Des jours fériés en l’honneur de la Nation et de certains empereurs
J’aurais tendance à classer dans cette catégorie la moitié des jours fériés japonais – soit 8 sur un total de 16 – et à introduire deux sous-ensembles. A cet égard, par souci de clarté, il me semble utile de distinguer d’un côté, les jours fériés en lien avec des empereurs et de l’autre, les jours fériés en rapport avec la nation japonaise en tant qu’Etat monarchique constitutionnel.
Les jours fériés rendant hommage à des empereurs
Dans cette catégorie, on trouve de façon directe 3 dates au calendrier :
- le 23 février, date anniversaire de Naruhito, empereur du Japon actuellement en charge du trône du Chrysanthème.
- le 29 avril, ancienne date anniversaire de feu l’empereur Hirohito.
- le 4 mai, jour férié instauré après sa disparition, en hommage à feu l’empereur Hirohito (1901 – 1989).
Les jours fériés se rapportant à la nation japonaise
Aux jours fériés précédents, s’en ajoutent 5 autres en rapport avec la nation japonaise et son actuelle Constitution :
- le 11 février : jour férié célébrant la fondation mythique de l’Etat japonais, associée au nom de l’empereur Jinmu (premier de la lignée des 126 empereurs).
- le 3 mai, qui commémore l’entrée en vigueur de la constitution d’après-guerre.
- le 3ème lundi de juillet : jour férié dédié à la mer, ayant pour toile de fond le souvenir d’un périple en bateau à voile effectué par l’avant-gardiste empereur Meiji (1852 – 1912) qui a propulsé le Japon dans la modernité et l’occidentalisation.
- le 2ème lundi d’octobre : jour férié dédié aux sports et à l’activité physique, en vertu d’un droit constitutionnel prônant que tout citoyen doit pouvoir jouir d’une vie décente garantissant santé et culture.
- le 3 novembre : jour férié commémorant la promulgation de la constitution d’après-guerre et visant à promouvoir la culture au sens large, garante de paix et de liberté. Accessoirement, il s’agit aussi de l’ancienne date anniversaire de l’empereur Meiji.
Au passage, on notera que trois de ces dates entretiennent un lien étroit avec deux empereurs emblématiques : Jinmu et Meiji.
Une constellation de fêtes et de jours fériés aux origines et finalités variées
Pour le reste, on observera un ensemble de jours fériés et de fêtes traditionnelles héritées de l’ancien calendrier, classables par types d’origine et de finalité.
Cela permet de faire ressortir les catégories suivantes, étant entendu par ailleurs que certaines fêtes peuvent relever de plusieurs catégories à la fois :
- des fêtes et rites à connotation religieuse dédiées au Nouvel An, aux travaux agricoles (semences et récoltes) et aux défunts : o shôgatsu, kagamibiraki no hi (11 janvier), o bon (entre mi-juillet et mi-août selon les régions), setsubun no hi (3 février).
- des rites de passage : seijin no hi (2ème lundi de janvier) et shichi go san (mi-novembre).
- des fêtes d’origine impériale datant de la période Heian et popularisées pendant la période d’Edo : kodomo no hi (5 mai), hina matsuri (3 mars).
- des fêtes popularisées sur la base de légendes chinoises : tanabata (7 juillet), jûgoya (entre la 2ème décade de septembre et la 1ère décade d’octobre).
- des fêtes exprimant la gratitude à l’égard des personnes âgées (keirô no hi : 3ème lundi de septembre) et des travailleurs (kinrô kansha no hi : 23 novembre).
- des fêtes « d’opportunité » de création récente, visant à inciter les Japonais à prendre des congés : umi no hi (3ème lundi du mois de juillet), yama no hi (11 août).
- une fête de création japonaise, à vocation purement commerciale : le White Day (14 mars).
- des fêtes « d’emprunt » à l’Occident : Noël, la Saint Valentin, Halloween.
Dans cette liste non exhaustive mais représentative, vous retrouverez aisément en rouge, les jours fériés inscrits au calendrier actuel et en bleu, les jours de fête hérités du calendrier traditionnel. A toutes fins utiles, je vous rappelle que ces dates sont toutes abordées, mois par mois, dans mes précédents articles. N’hésitez donc pas à y revenir ! 😉
La journée du 15 août tient quant à elle une place très particulière puisqu’elle commémore la fin de la Seconde Guerre mondiale. Il ne s’agit ni d’un jour férié ni d’une fête à proprement parler, mais d’une journée de mémoire qui fait date dans l’histoire récente du Japon. A ce titre, elle est d’ailleurs précédée par deux cérémonies du souvenir les 6 et 9 août, à Hiroshima et Nagasaki. Nous aurons l’occasion d’y revenir très prochainement….
Notre périple au coeur du calendrier japonais d’aujourd’hui touche ainsi à sa fin.
J’espère que la complexité révélée par ce calendrier sous une apparente simplicité, vous aura paru riche d’enseignements !…
En tout cas, de mon point de vue, il constitue une excellente clé d’entrée sur la culture et la société japonaise.
Pour finir, je vous propose de nous quitter en musique avec cette suave interprétation d’une célèbre chanson de l’auteur compositeur Toyahisa Araki (1943 – ) par le groupe japonais Foresta :
四季の歌/shiki no uta/ La chanson des quatre saisons
Sur ce, je vous laisse maintenant à vos propres réflexions. Comme toujours, je vous invite à les partager ou à me les transmettre directement ! 🙂
ではまた ! Dewa mata !
A bientôt !